En tant que société de conseil spécialisée dans des expertises digitales, la requête de la Fondation Sanofi Espoir était effectivement un peu différente de nos missions habituelles !  Laissez-nous vous en parler en détails :

 

 

Quelle a été la genèse de cette mission ? 

Nous avons été mis en relation avec la Fondation Sanofi Espoir au cours de l’année 2018. La Fondation intervient sur le financement de 3 types d’intervention : le cancer de l’enfant, l’accès aux soins en France et la santé maternelle et néonatale. Après 10 années de financement de projets à l’impact mitigé sur ce 3e volet, la santé maternelle, Valérie Faillat, déléguée générale de la Fondation, a souhaité prendre du recul sur cette activité et tester une approche nouvelle pour, à terme, identifier et financer des projets avec un plus fort impact et ancrage local. 

 

Après plusieurs sessions d’échanges et de réflexions, nous avons imaginé une approche méthodologique puisant dans nos différentes expertises Acceleration Tactics : le Design Thinking (pour être centré sur les utilisateurs), l’Agile (pour itérer rapidement en cycles courts) et le Lean (tester rapidement des petites victoires pour réajuster en continu). Mais ces expertises seules ne suffisaient pas, c’est pour cela que nous avons travaillé en étroite relation avec l’ONG WAHA intervenant en santé maternelle au Sénégal pour se rendre sur le terrain avec nous. 

 

C’est ainsi qu’a démarré l’aventure du projet mené à Saint-Louis. L’objectif était de tester cette approche dans un pré-pilote pour valider l’impact terrain, et à terme, de rendre autonomes des experts locaux pour la déployer à une échelle plus large. Nous nous sommes concentrés sur le département de Saint-Louis sur les conseils de WAHA, département qui offre une grande variété de situations et nous a permis d’avoir une base de comparaison entre les femmes en zone urbaine, péri-urbaine et rurale. 

 

 

 

Et concrètement, qu’avons-nous fait ?  

Nous avons commencé le projet par une phase d’initialisation sur le sujet complexe de la santé maternelle et néonatale en réalisant des interviews avec des sachants et experts de tous horizons (OMS, UNFPA, Ministères de la santé, anthropologue de la santé…). Nous avons également préparé notre immersion terrain : la méthodologie seule ne suffisant pas, nous avons travaillé main dans la main, dès le début, avec un expert de l’ONG Artémédis (anciennement WAHA). Nous avions l’habitude de réaliser des immersions dans les bonnes pratiques du Design Thinking et de la recherche utilisateur, mais nous partions pour la première fois dans un environnement doublement étranger, tant sur l’aspect géographique que culturel. 

 

C’est donc à 3 que nous sommes partis sur le terrain, avec deux experts Saegus et un expert WAHA. Pendant 3 semaines, nous avons sillonné le département de Saint-Louis : nous avons rencontré différentes parties prenantes locales, mené des interviews et des observations en multipliant les points de vue et les contextes. Cela nous a permis de réaliser une première analyse et cartographie des expériences locales, très complexes. Nous sommes retournés sur le terrain une deuxième fois pour présenter ces analyses et mener des ateliers avec des femmes pour qu’elles priorisent elles-mêmes les variables les plus importantes pour elles dans leur expérience. Nous avons pu ensuite prioriser les moments de leur expérience et définir des variables indispensables à prendre en compte toutes ensemble dans la conception de projets à plus fort impact sur le terrain.  

 

Quelles difficultés avons-nous rencontrées sur le terrain ? 

Oh oui ! Une recherche terrain n’est jamais simple ! La première difficulté a commencé avant même le fait d’aller sur le terrain. Les experts en santé étaient sceptiques sur notre présence sur une mission, car nous ne sommes ni acteurs de l’humanitaire, ni experts en santé maternelle et néonatale. Lorsque nous avons pu montrer nos analyses, cependant, ces mêmes experts ont reconnu l’intérêt de notre méthodologie et se sont fait les ambassadeurs du projet ! 

 

La deuxième difficulté a été sur le terrain. Nous ne parlions pas wolof, et nous avions donc peur des biais d’interprétation et de traduction, de passer à côté de nuances et spécificités culturelles et langagières pourtant cruciales. Cependant, le fait d’être accompagnés par l’ONG WAHA et par d’autres acteurs locaux, ajouté à la multiplicité des points de vue, nous a permis de palier à cette difficulté.  

 

Il n’était pas évident de rencontrer des femmes en situation de souffrance, mais nous avons pu écouter leurs histoires, leurs expériences, les comprendre, et nous avons pu réaliser une analyse qui leur donne voix et les met au centre de la démarche. C’est vraiment la force d’une approche centrée sur les bénéficiaires : en étant à leur contact, sur leur lieu de travail avec eux, dans leurs conditions de vie, dans leurs familles, nous rentrons en empathie avec eux et nous savons pour qui nous faisons. Avec l’humain au centre, les énergies ne peuvent être que dans le bon sens, c’est-à-dire dans le sens… de l’humain ! 

 

 

 

Quels sont les apprentissages que nous retirons  ? 

Ils sont nombreux, tant sur le plan de l’enrichissement personnel que professionnel. Le premier apprentissage est que les expertises méthodologiques que sont le Design Thinking, la recherche utilisateur ou l’Agile ont fait leurs preuves en étant appliquées à un domaine autre que le digital. Elles fonctionnent pour 3 raisons :  

  • Elles sont envisagées dans une approche, un cadre sur-mesure, pensé pour le projet et son contexte spécifique 
  • Elles s’appuient sur des équipes multidisciplinaires, en l’occurrence des experts locaux et d’une ONG, sans qui le terrain n’aurait pas été envisageable 
  • Elles ont été éprouvées au préalable par des experts expérimentés, robustes, qui savent composer avec l’incertain et l’imprévu 

 

Ensuite, le besoin de prendre du recul sur son activité et d’aller sur le terrain. On ne le dira jamais trop : il faut aller voir, il faut se rendre compte, il faut discuter avec des interlocuteurs très opérationnels qui font au quotidien. Ce sont eux qui savent et, le plus souvent, les bonnes idées sont déjà là ! Les moyens de les réaliser, en revanche, pas toujours. Il y a un véritable besoin de reconnecter les orientations stratégiques et la manière d’envisager des programmes avec des portfolios de projets, quels qu’ils soient, avec le terrain.  

 

Enfin, ce projet a confirmé l’une de nos convictions : il faut avancer tactiquement, petit à petit, et réajuster en permanence à la réalité du terrain en mesurant l’impact et les ressources. Nous avons commencé avec un pré-pilote, qui pourra donner un pilote, qui lui-même pourra passer à l’échelle au Sénégal et pourquoi pas d’autres pays. 

 

Quelles sont les suites  ? 

Nous souhaitons aller au bout de l’histoire : nous retournerons sur le terrain en Novembre pour co-créer des projets avec les acteurs locaux, sur la base de nos apprentissages. L’objectif est de leur donner la main et de faciliter des ateliers pour aboutir à des projets qui brisent les silos de la santé maternelle et néonatale et incluent différentes composantes comme l’éducation, la formation, les transports et, bien sûr, la santé.  

 

De plus, le projet sert de point de démarrage à une équipe de doctorants d’Oxford et de La Sorbonne pour mener une étude spécifique au niveau de l’hôpital de Saint-Louis. C’est donc aussi le début d’une rencontre entre différents mondes : le monde humanitaire, le monde académique, et le monde de Saegus, celui du conseil en digital, mais pas que ! 

 

 

Si vous souhaitez des précisions, Marouchka Hebben, experte méthodologique sur le projet mené avec la Fondation Sanofi Espoir se fera une joie de vous répondre.

 

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